Le biais du favoritisme de groupe
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«Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts.»(*1)
Ces mots du 10 septembre 1939 prononcés par Paul Reynaud président du conseil français(*2), faisaient appel au reflexe du favoritisme de groupe.
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(*1) «C’est le contraire qui eût été joli», insinuait Jean Cocteau,
Le slogan s’inscrit dans la propagande alliée de la guerre 39-45. Les historiens s’interrogent encore sur le réel rapport des forces.
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(*2) Le gouvernement avait multiplié les déclarations rassurantes, proclamées sur un ton martial, au début de la guerre que la France et la Grande-Bretagne avaient déclaré à l’Allemagne le 3 septembre 1939 suite à son invasion de la Pologne le 1er septembre.
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Le biais de favoritisme intragroupe est la tendance à favoriser les gens qui appartiennent à un même groupe que nous, comparativement aux personnes qui n'en font pas partie.
Le favoritisme de groupe est l’un des biais les plus étranges et les plus courants, il a été défini par le psychologue social polonais Henri Tajfel et ses collègues.
Quel que soit le groupe auquel vous vous identifiez, votre classe, votre groupe d’amis les plus proches, les supporters d’une équipe sportive, etc., vous avez tendance à avoir une meilleure opinion des membres de “votre” groupe que des membres des “autres” groupes, par exemple, l’équipe rivale ou les personnes qui vont dans une autre école.
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Nous survivons en groupe, et c’est ainsi que la quasi-totalité de notre vie sociale en tant qu’êtres humains a évolué.
Faire partie d’un groupe protégeait contre les dangers de la vie en solitaire. Nos ancêtres en avaient besoin pour survivre. Ce qui a évolué parallèlement à ce mode de vie, c’est le favoritisme de groupe, qui nous pousse à nous accrocher à notre propre groupe.
L’appartenance à un groupe change notre façon de voir les comportements des membres des autres groupes. On ressent une impression favorable envers les membres du groupe et une certaine indulgence pour ses éventuels excès.
Ce biais est une conséquence du biais de l'erreur ultime d'attribution.
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Pour avoir plus de détails sur Le biais de l'erreur ultime d'attribution aller voir l’article là. . .
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Avoir une meilleure opinion de soi et du groupe auquel on appartient a son opposé, une moins bonne opinion des autres groupes.
Cela peut avoir pour conséquence de dénigrer, voire de maltraiter les membres des groupes extérieurs.
Comme tous les biais cognitifs, ils se déclenchent automatiquement, comme un réflexe, sans que nous en ayons conscience.
Le marketing et la communication politique, en particulier, peuvent cibler vos biais pour vous persuader d’acheter quelque chose ou de voter pour quelqu’un.
Vous pouvez probablement imaginer la facilité avec laquelle ce biais est utilisé à mauvais escient.
Le biais “groupe interne vs. groupe externe” est utilisé chaque fois qu’un politicien parle de “nous” contre “eux”, c’est-à-dire “notre peuple, auquel nous appartenons”, et “les autres personnes, auxquelles nous n’appartenons pas”.
Il existe des millions d’exemples de ce genre. Vous ne vous en souvenez peut-être pas, mais lorsque le président américain George W. Bush a voulu partir en guerre contre le groupe terroriste Al-Qaida en 2003, en attaquant l’Afghanistan et l’Irak, il a prononcé un discours célèbre :
«Les Américains se demandent : Pourquoi nous détestent-ils ?”
Ils détestent ce qu’ils voient ici même dans cette enceinte : un gouvernement démocratiquement élu. Leurs dirigeants sont autoproclamés. Ils détestent nos libertés : notre liberté de religion, notre liberté d’expression, notre liberté de voter et de nous réunir, et notre liberté de désaccord avec les autres. […] Ils s’opposent à nous parce que nous nous opposons à eux.»
Il s’agit d’une technique qui fait appel au biais qui oppose les groupes. Des mots comme “nous”, “notre”, “nos”, “ils” et “elles” sont des exemples typiques de discours où l’orateur divise la société en deux catégories. Le public-cible est “nous”, les “bons”, et “ils” sont les “méchants”.
Cette dichotomie déclenche automatiquement le biais de favoritisme de groupe.
De nombreux hommes politiques de différents pays utilisent dans leurs discours des récits biaisés qui opposent les groupes de façon simpliste. Voici donc l’exemple d’en face :
“Vos pays sont remplis de bases américaines avec tous les infidèles qui s’y trouvent et la corruption qu’ils répandent”(*3).
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(*3) Ces propos ont été tenus par le chef d’Al-Qaida, Ayman al-Zawahiri, qui a appelé les musulmans à attaquer les cibles militaires américaines, européennes, israéliennes et russes dans un discours prononcé à l’occasion du 18e anniversaire des tristement célèbres attentats du 11 septembre 2001, à l’aide d’avions détournés contre les tours jumelles de Manhattan et d’autres cibles sur le sol américain par le groupe terroriste Al-Qaida.
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Vous voyez ? Il y a toujours “nous”, qui sommes les gentils, que ce soient les musulmans pour al-Zawahiri ou les Américains pour Bush. Et il y a toujours le "vous" des méchants, pas seulement ceux qui font de mauvaises choses, des terroristes ou des tueurs, mais toute une ethnie, une nation entière.
C’est ainsi que vous créez un sous-groupe facilement reconnaissable, “eux”, “les méchants”, “les ennemis”. Il est alors très facile de les rendre responsables de certaines mauvaises choses, et de diriger votre colère contre eux.
La prochaine fois que vous entendrez un politicien affirmer que c’est “nous” contre “eux”, pensez biais de favoritisme de groupe.
Car les choses ne sont pas aussi simples que cela.
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c’est nous les meilleurs
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l'erreur ultime d'attribution
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