Les illusions, le syndrome du sauveur

par Jean Marie Champeau 6 Février 2024, 03:00 biais de personnalité

 

Le syndrome du sauveur.

sauveur


Il sort son briquet et allume des feuilles. Il attend que le feu prenne puis repart.

 

De là, David, appelons le David, se rend à la caserne de pompiers où il travaille comme bénévole.

 

Quand les sirènes de la ville ont retenti, il était prêt à partir. Les autres membres de l’équipe sont arrivés dix minutes plus tard. Ils ont escaladé les camions et pris la direction du parc national, d’où David revenait tout juste.

 

«Quand je suis parti, la zone qui brûlait était à peine plus grande qu’une table, raconte-t-il. Mais quand j’y suis retourné, quelques heures plus tard, l’incendie faisait plusieurs kilomètres de long.»

 

Une fois le travail des pompiers terminé, le capitaine a posé sa main sur l’épaule de David en lui disant «tu t’es bien débrouillé, mon pote», un compliment dont il avait toujours rêvé mais qu’il n’avait jamais reçu. 

 

À ce moment-là, David a décidé de faire tout ce qu’il pouvait pour se sentir valorisé comme ça à nouveau.

 

Cet extrait d’une interview d’un pompier pyromane australien illustre le syndrome du sauveur. 

 

Le syndrome

 

Le syndrome du sauveur peut se définir comme un besoin viscéral d’aider autrui. 

 

Extérieurement, la personne fait toujours passer les autres avant elle-même mais derrière le côté protecteur se cache une blessure narcissique associée à une forte dépendance affective et une personnalité égocentrique.


Aider les autres est une qualité appréciable lorsqu’elle s’exprime de façon sincère et désintéressée. Les personnes altruistes ne viennent en aide que lorsqu’une personne en exprime le besoin. Elles se mettent en retrait. C’est l’autre qui est au centre de leurs préoccupations.

 

A l’inverse les "sauveurs" vont chercher à aider autrui par tous les moyens. Ils sont capables d’user de leur influence pour manipuler l’autre dans le but de le secourir. Lorsqu’ils portent "secours", ils mettent en avant leurs actions. Ce sont eux qui sont au centre de leurs préoccupations.

 

Conséquences
Illustration graphique du triangle de Karpman. on y retrouve les rôles de persécuteur, victime et sauveur. 
triangle de Karpman

 

A travers ses échanges relationnels, le sauveur cherche à réaffirmer le scénario qu’il s’est créé intérieurement, celui du «super héros». 

 

Ce scénario relationnel se retrouve dans le triangle de Karpman ou triangle dramatique(*1). Cette théorie explique le fonctionnement des relations toxiques.

 

Pour qu’il y ait apparition d’un triangle dramatique, il faut un minimum de deux personnes qui vont au cours de leur relation interchanger trois rôles : le sauveur, le bourreau et la victime.

 

Lorsqu’on est atteint du syndrome du sauveur, nos relations fonctionnent généralement à travers le prisme du triangle. Un «sauveur» se condamne donc inconsciemment à évoluer dans des relations toxiques.

 

Le syndrome du sauveur peut causer une grande souffrance à celui qui en est atteint comme à son entourage. Le cerveau fait constamment cogiter sans raison apparente : La peur de perdre l’amour des personnes qui nous entourent, la peur de perdre l’estime que nos proches nous portent et la peur d’être abandonné.

 

Ces angoisses poussent à créer des relations fusionnelles. Un cadre dans lequel on oublie le «soi» au détriment du «nous».

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(*1) Le triangle dramatique est une figure d'analyse transactionnelle proposée par le psychologue américain Stephen Karpman en 1968. Il met en évidence un scénario relationnel typique entre victime, persécuteur et sauveur.

 

«Laissez-moi vous aider !». Le sauveur a un rôle très gratifiant d'un point de vue narcissique mais qui place la victime en incapacité de résoudre ses problèmes. Il attend un persécuteur pour justifier son existence et une victime à sauver.

 

«Tout est de votre faute !». Le persécuteur agit sur la victime. Le persécuteur n'est pas obligatoirement une personne: ce peut être, par exemple, une maladie, ou tout élément perturbateur qui contribuera à placer la victime dans cette position.

 

Les rôles peuvent être globalisés et peuvent concerner des groupes de personnes.

 

 

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syndromesauveur

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